Bilan 2022 : A l’échelle nationale, le volume d’activité, porté par l’inertie, a globalement été bon sur l’année 2022. Le BTP du fait de ses carnets de commande étoffés a progressé mais les premiers signes d’inquiétude apparus en septembre pour les Travaux Publics et en octobre pour le Bâtiment s’accentuent depuis.
En matière de Bâtiment, l’activité 2022 a progressé de 3,7 % en volume ce qui la laisse encore à 1,5 % en-deçà du niveau d’avant crise sanitaire à prix constants. Le logement neuf s’affiche à + 5,1 % grâce à une bonne dynamique des mises en chantier, toutefois, il accuse une baisse de 1,6 % à fin octobre sur 12 mois glissants et chute de -3,4 % sur les 3 derniers mois. Plus en amont, les réservations de logements baissent respectivement de 5,7 % sur un an et 16,8 % sur les 3 derniers mois. Les taux d’intérêt augmentent pénalisant les primo-accédants. Le Ministère de la Transition Ecologique a d’ailleurs publié le 29/12/2022 les chiffres, à fin novembre : sur les 3 derniers mois le nombre de PC recule de 34,9 %. L’amélioration entretien se lit à hauteur de 2,1 % et renoue quasiment avec son niveau de 2019, malgré des dispositifs d’aides dont l’accès s’avère kafkaïen pour les ménages. Le non résidentiel progresse de 6,6 % porté par les bâtiments industriels ainsi que les commerces.
Concernant les Travaux Publics, après un début d’année dynamique comme le Bâtiment, l’activité a été percutée par le choc inflationniste, conséquence du déclenchent du conflit Russo-Ukrainien. Dès le mois de septembre, sur 12 mois glissants, l’activité s’en est ressentie avec une chute des travaux réalisés de 8,6% en volume, depuis cette baisse est restée constante. Il en va de même pour les prises de commandes qui, après une légère embellie en septembre, régresse à nouveau pour atteindre - 8 %.
En Isère, les logements commencés sont sur la même tendance qu’au national, en revanche les logements autorisés dans leur ensemble dévissent très fortement à hauteur de - 43,4 % avec un pic de - 52,1 % pour le collectif à fin novembre. Le nombre de dossiers d’aide à la rénovation énergétique via le dispositif MaPrimeRénov’ baisse également de façon plus prononcée avec -17%. Pour les Travaux publics, il est constaté une érosion des carnets de commandes depuis juillet dernier ce qui, à n’en pas douter, alimentera la tension sur les prix.
Perspectives début 2023 : En 2023, l’activité du bâtiment devrait encore croître bien que plus modestement à + 0,7 % notamment grâce à des carnets de commande à bon niveau fin 2022. Le logement neuf entrerait en crise pour atteindre - 2,6 % compte tenu d’une baisse de près de 10 % des mises en chantier qui tomberaient à 360 000 unités, suite à la chute des permis (-21,3 %) et à l’effondrement des ventes de 2022. Le non résidentiel ralentirait fortement à + 1,7 % eu égard au contexte économique et foncier qui pèserait sur les surfaces autorisées (-0,8 %). Quant à l’entretien rénovation l’activité resterait bien orientée encore tirée par la rénovation énergétique.
L’activité des Travaux Publics sera conditionnée par la poursuite des tensions inflationnistes qui pèsent sur les budgets de nombreux maitres d’ouvrage publics créant parfois une situation propice à l’attentisme, alors même que cette année de milieu de cycle municipal devrait correspondre à une période de concrétisation dans les collectivités.
L’étau se resserre au travers d’un environnement macro-économique détérioré. La situation financière des entreprises est préoccupante et leurs trésoreries continuent à se dégrader. En effet, gérer une crise qui a pour origine un seul paramètre reste possible. Mais être amené à gérer la hausse des prix des matériaux, à subir la hausse exponentielle des coûts de l’énergie, à intégrer la mise en place de la RE2020 (réglementation environnementale), du ZAN (zéro artificialisation nette), de la REP (responsabilité élargie du producteur) ce à quoi il faut ajouter le remboursement des PGE, s’avère aujourd’hui très complexe. La grande question pour 2023 réside dans le fait de savoir comment les entreprises pourront répercuter ces hausses de coûts dans leurs prix, alors que les donneurs d’ordres subiront une diminution de leur revenu réel.
L’inflation et ses conséquences renforcent clairement les incertitudes pour les maîtres d’ouvrage et notamment pour les collectivités qui disposent pourtant de réserves de haut niveau (record d‘encours de trésorerie à plus de 83 Md€, + 16 % sur 1 an). La confiance doit l’emporter sur l’attentisme et ce devrait être le moment pour une accélération des investissements. Les entreprises de BTP en auront besoin tout comme d’une réelle solidarité de la filière.
Les carnets de commandes oscillent entre 3 et 7,2 mois pour l’ensemble des entreprises de BTP selon leur taille. Paradoxalement ces commandes ne les sécurisent pas car la crise de l’énergie est telle que certaines d’entre elles se questionnent quant à l’arrêt des chantiers.
Le prix du mégawatt plombe les marges car dans le neuf, les contrats de chantiers ne bénéficient d’aucune aide ! De la même façon, de plus en plus d’entreprises envisagent de résilier leur marché. Lorsqu’un marché a été traité l’année précédente (ou 2 ans avant), l’application d’une formule de révision quand le marché est révisable, ne couvre pas l’augmentation continue du prix de certains matériaux et encore moins celle de l’énergie.
Préoccupations et faits marquants : Le système semble se gripper, les entreprises ont besoin de visibilité à moyen, long terme. Cependant chaque acteur de l’acte de construire semble défendre son pré-carré à très court terme sans envisager une solution commune et globale, une saine solidarité.
Enfin, la ZFE reste un problème d’actualité car les solutions techniques alternatives en corrélation avec l’activité du BTP ne sont pas pleinement au rendez-vous. Au regard du contexte décrit ci-dessus certaines entreprises n’auront pas la capacité de renouveler leur parc malgré les aides et les dérogations temporaires. De plus, les activités connexes au BTP fonctionnant avec des poids lourds (4x2) sont pleinement impactées et, malgré un renouvellement régulier de leur flotte, le nombre de PL qu’il faudrait aujourd’hui changer n’est pas supportable financièrement.